top of page

 

Analyse du Docteur en littérature Jean-Paul Gavard-Perret spécialiste de

l’Image au XXe siècle et de l’œuvre de Samuel Beckett  

et critique d’Art d'art contemporain .

Jackie Macha les seins et leurs anges.

​

Le collage est le fondement technique de la création chez Jackie Macha. Elle lui sert - hors de postures prétentieuses dont se drapent tant de créateurs ou qui se prennent pour tels - de dérouler le fil de ses narrations où l’intime avance masqué. L’artiste n’opère pas à cœur ouvert. Elle n’a pas du sang sur les mains mais uniquement de la colle. Privilège d’une technique qui peut tout dévoiler par tout ce qui recouvre. L’artiste se trouve à l’aise dans un tel jeu. Il correspond en outre à son sentiment solaire de la vie et de l’art.

Chez elle il ne se préoccupe pas de vertus ou de vices - même s’il est affiché dans une de ses Å“uvres qu’ « il n’est pas de fumée sans feu »...  De ce dernier l’artiste retient la plastique de lumière. Par son énergie elle devient l’espionne agissante du réel en prouvant que sous son apparence tout se décolle.  Et la créatrice le recompose selon des réseaux qui lui permettent de montrer tout haut ce qu’elle n’oserait dire tout bas. A chaque regardeur de voir, d’imaginer. Il y a là des fables diffractées : des femmes aux toilettes impeccables ont des yeux aux carreaux du cÅ“ur. La chevelure d’étoupe d’autres égéries se consume la nuit en des mains électriques. Aucune d’elles ne poursuivent l’absolu : elles savent que lorsqu’on court après il galope néanmoins le réel est moins pittoresque que chargé d’existences. S’appliquant avec autant de rigueur que de liberté Jackie Macha insinue qu’on ne peut pas toujours inscrire les mots d’amour tant celle (ou celui) à qui on les destine feint le sommeil au bord d’une table baignée d’ombre.  Pour le prouver en chaque montages les formes rampent comme des reptiles et ne cessent de bouger : le collage a le mérite d’enlever à l’image l’impression de vie immobilisée. Pour preuve qui croit rentrer dans une chambre se retrouve à une terrasse d’un café.

Verticaux, horizontaux ou obliques les pans se zèbrent les uns les autres pour donner le vertige par effet de guirlandes. Celles-ci ne servent plus de décor. Elles sont le langage même d’une Å“uvre généreuse, joyeuse, exubérante.  On peut croire au serpent comme à la pomme dans un tel paradis terrestre qui n’ignore rien de l’enfer. S’y devinent des jeux de dupes. Quoi de plus normal ? L’artiste parle d’un monde qui n’est pas autre mais nôtre avec ses images toutes faites  auxquelles l’impératrice du lieu offre des accointances inédites.

A l’opposé de tous ceux qui cultivent l’indignation purement verbale (parfait clone de la résignation et du pessimisme) l’artiste opte pour l’optimisme en acte. On glisse avec délectation entre visages, bras, seins, ventres, dentelles, brosses, costumes.  Dieu tout compte fait pourrait être une belle fille.  Car pour l’artiste il n’est pas de choses ou de concepts avec lesquels on ne puisse pas plaisanter. En sus, dans une maîtrise qui n’a rien de bricolée l’artiste crée son propre kitsch. Elle croît encore à l’âge d’or de l’image : pour preuve elle sait la détourner de ses logos imposés par l’humour et la dérision habilement critique car jamais appuyée. Après tout la morale d’une telle Å“uvre ne résiderait-elle pas dans l’art de placer une belle paire de seins ? C’est peu diront certains. Pour notre part on se serait contenté de moins.

 Jean-Paul Gavard-Perret

bottom of page